LES ETAPES DE LA VIE MONASTIQUE
DISCERNEMENT ET APPRENTISSAGE
Il faut du temps pour devenir libre et s'engager en toute responsabilité. C'est pourquoi, depuis toujours, l'intégration dans la vie monastique se fait de façon progressive, dans un processus de maturation et de transformation lent, qui épouse le cheminement intérieur de chaque personne.
Mon cœur a soif de toi...
La germination d'une vocation est toujours mystérieuse, unique. Une soif plus profonde met en recherche, un événement imprévu surprend, interpelle... Un conseil, une parole, une rencontre...
Le désir s'affine, se recherche : quelle forme lui donner ? Une vie marquée par la recherche de Dieu, la fraternité, la simplicité : oui, mais où ? comment ? Quelle forme lui donner ?
Il convient d'engager un chemin de discernement, si possible avec de l'aide, se lancer à la découverte des propositions de l'Eglise, dans la certitude que Dieu nous appelle là où nous pouvons le rencontrer... souvent dans la proximité inattendue.
Regarder, faire connaissance
Une communauté attire plus que les autres, a priori. C’est le moment d’aller voir de plus près. S’adresser à la Mère Abbesse, faire quelques séjours à l’hôtellerie, puis un séjour en clôture. Rencontrer la "maîtresse des novices" (c'est le nom traditionnellement donné à la soeur à qui est confié l'accompagnement de celles qui sont intéressées et demandent à discerner et éventuellement à s'intégrer) et s’entretenir avec elle. Prier et découvrir un quotidien, une communauté avec ses richesses et ses pauvretés, ses caractères, et se sentir chez soi, ou pas.
Les aspirantes à la vie monastique sont accueillis avec bonté; cependant on ne leur accorde pas facilement l'entrée. La fréquentation du monastère leur permet de faire connaissance avec la communauté et elles sont averties des choses dures et âpres par lesquelles on va à Dieu. Elles ne sont reçues en communauté que si elles manifestent les dispositions spirituelles exigées pour une vie monastique, jointes à une maturité et une santé suffisantes : c'est alors que leur désir d'embrasser cette vie pourra être reconnu comme le signe d'un appel divin, le signe aussi de leur intention de chercher vraiment Dieu et de tout leur cœur.
L'aspirantat est l'étape où la candidate acquiert une connaissance initiale de la communauté et la communauté de la candidate, à travers une série de contacts et de moments d'expérience communautaire. L’aspirantat est d'une durée minimale de douze mois mais ne dépasse pas deux ans.
Constitutions des moniales, C. 46 : L'admission des sœurs
Entrer : le temps du postulat
Après un stage, si la regardante le demande et que la communauté est d’accord, on peut envisager une entrée. Mais rien n’a lieu dans l’immédiateté : « Celui qui est digne de confiance dans une toute petite affaire est digne de confiance aussi dans une grande » (Luc 16, 10), et il faut en premier lieu tenir ses engagements dans le monde, en terme d’études ou d’emploi. Des mois d’attente, où rien n’est joué, où comme au désert le désir grandit et mûrit.
La postulante demeure libre, elle ne s’engage pas : elle met son désir à l’épreuve du quotidien. Elle découvre mieux la règle et la vie commune, elle entre dans la vie et la prière communautaires.
Les postulantes sont initiées aux disciplines spirituelles de l'Ordre d'une manière qui leur convient à ce stade. Le postulat a une durée minimale de douze mois qui peut être prolongée selon les besoins par l'abbesse, après avoir entendu son Conseil, mais ne doit pas dépasser deux ans.
Constitutions des moniales, C. 46 : L'admission des sœurs
le Noviciat
Si elle persiste et le demande, si la communauté l’accepte, elle peut demander à commencer son temps de noviciat. Elle reçoit l’habit : la robe, le scapulaire, le voile, la chape. Tous ses vêtements sont blancs, comme ceux de la fiancée biblique : quel que soit son âge, elle est jeune devant Dieu et la communauté. Ce temps de noviciat est un temps de maturation, de formation plus exigeante, mais pendant lequel la novice reste totalement libre. Elle peut à tout moment réviser son choix et demander à partir, la communauté peut aussi considérer qu'il est souhaitable pour cette jeune qu'elle continue son chemin dans un contexte qui lui sera plus favorable.
La maîtresse des novices aide les débutantes à s'intégrer dans la famille monastique. Elle les initie aux pratiques monastiques, particulièrement à l'Œuvre de Dieu, à la lectio divina, à la prière et au travail manuel. Durant le noviciat, on ne confie aux novices aucune charge ni occupation qui puisse mettre obstacle à leur formation. Par leur prière et leur exemple, toutes les sœurs les soutiennent et les entraînent à persévérer.
Même en cette école de l'amour qu'est le monastère, il peut surgir des obstacles à la pleine maturité affective. Aussi importe-t-il au plus haut point que la communauté offre aux sœurs une aide pour surmonter ces difficultés. Que la maîtresse des novices veille constamment à discerner les traits de caractère de celles-ci et leurs progrès, qu'elle les conduise à la connaissance de soi. Au besoin elle a recours à des spécialistes en la matière. La formation des novices n'est confiée qu'à des sœurs sages et capables.
Constitutions des moniales, C. 49 : La formation des novices
Les vœux temporaires
Au terme de cette période, si la novice le demande, on lui relit la règle. Si elle exprime solennellement son désir de s’engager dans cette voie, la communauté se réunit et vote : acceptons-nous que Soeur X s’engage dans la communauté ? Est-ce bon pour elle et pour nous ? Acceptée, la novice fait profession temporaire entre les mains de l’abbesse : elle s’engage pour trois ans dans les vœux d’obéissance, de conversion des mœurs et de stabilité. Ces vœux seront renouvelés ensuite pour une durée d'au moins deux ans.
En signe de son engagement, elle reçoit un scapulaire noir, une ceinture de cuir, mais conserve la chape et le voile blanc.
Au cours du noviciat on examine soigneusement si la novice tire un profit spirituel de sa participation à la vie monastique. Si vraiment elle cherche Dieu, si elle est empressée à l'Œuvre de Dieu, à l'obéissance et aux humiliations, et si elle est apte à vivre correctement, dans la solitude et le silence, les relations communautaires qui tissent la vie cistercienne dans l'Ordre, l'abbesse pourra, avec le consentement du chapitre conventuel, l'admettre à la profession temporaire si elle le demande librement et une fois le noviciat accompli.
Constitutions des moniales, C. 51 : L'admission à la profession temporaire
Cette période de probation est un temps de maturation de la personne et de sa vocation, de formation aux diverses dimensions de notre vie :
La formation monastique se poursuit pendant le temps des vœux temporaires. Un programme de formation est élaboré pour les nouvelles professes afin que, de plus en plus, elles entrent dans la connaissance du mystère du Christ et de l'Eglise ainsi que dans celle du patrimoine cistercien et qu'elles s'efforcent de les faire passer dans leur vie. On veille à ce que les charges et les occupations confiées aux professes à vœux temporaires ne mettent pas obstacle à cette formation.
Constitutions des moniales, C. 53 : La formation des professes à vœux temporaires
La profession solennelle
Après au moins cinq ans de profession temporaire (l'instruction Cor Orans a prolongé le délai de probation), vient l’heure du grand engagement, pour toujours : à nouveau la communauté se retrouve, et vote pour accepter la professe . Celle-ci, solennellement au cours d’une messe signe la cédule qui l’engage, la dépose sur l’autel et fait profession entre les mains de l’abbesse, devant l’Eglise en ses représentants. Elle quitte alors la chape pour recevoir la coule, vêtement monastique par excellence, avec ses longues manches, blanche chez les cisterciens. Elle reçoit aussi le voile noir. Elle est membre à part entière de la communauté et de l’Ordre. Elle est maintenant totalement libre et disponible pour le chemin de sainteté vers lequel son désir, maintenant éprouvé, l’attirait.
Par la profession des vœux solennels, la sœur se donne au Christ en esprit de foi et s'engage à vivre pour toujours dans sa communauté selon la Règle de saint Benoît. L'abbesse et les sœurs l'accueillent avec bienveillance dans la communauté, sachant qu'elles s'obligent au devoir de l'aider par leurs prières et leurs exemples à revêtir de plus en plus la ressemblance du Christ.
Constitutions des moniales, C. 56 : La profession solennelle
La fidélité au long cours
La profession solennelle ne signe pas l'arrêt de la formation, mais un commencement, la reconnaissance que la Sœur peut et veut cheminer sur cette route étroite, escarpée mais si belle que constitue la vie monastique, qu'elle s'impliquera chaque jour à rechercher le Christ dans son quotidien, et à grandir en charité pour Dieu et pour ses proches.
Après la profession solennelle et tout au long de leur vie, les sœurs ont à s'instruire de la « philosophie du Christ ». Un accompagnement est assuré aux nouvelles professes solennelles durant ce temps de particulière maturation de leur vocation. Une formation continue est proposée tant à la communauté dans son ensemble qu'à chacune des sœurs selon ses possibilités. Cette formation, qui s'appuie toujours sur la Règle de saint Benoît et le patrimoine cistercien, fait appel aux richesses des sciences biblique, patristique, liturgique, théologique et spirituelle.
Constitutions des moniales, C. 58 : La formation continue
